REGAIN, de Jean Giono, élu roman de l'année
Regain de Jean Giono arrive largement en tête de la sélection Clecture 2014 devant Mendiants et orgueilleux et Les chardons du Baragan, tandis que Le train de 8h47 termine en queue.
Rappelons les livres en lice :
- Georges Courteline, Le train de 8h47 ;
- Sue Hubbell, Une année à la campagne ;
- Jean Giono, Regain ;
- Albert Cossery, Mendiants et orgueilleux ;
- William Boyd, Comme neige au soleil ;
- André Gide, Isabelle ;
- Jean Teulé, Le Montespan ;
- Panaït Istrati, Les chardons du Baragan ;
- Louis-René Des Forêts, Ostinato.
Régine Fiorot qui avait proposé Regain à la sélection nous détaille les raisons de son choix :
«Lorsque j’ai proposé ce roman pour la sélection 2014, j’avais un vague souvenir de sa lecture.
C’étaient d'abord des images qui s’imposaient à moi : le « château de Jérusalem » situé en face de chez moi (dans le Nord) qui abritait à la fois l’atelier de dessin du mercredi et la bibliothèque. L’organisation et la disposition des livres respectait une partition enfants/adultes.
Je devais avoir une quinzaine d’années et j’osais aller quelquefois fouiner dans le coin des grands… avec cette petite émotion au creux du ventre : la peur de se faire « reprendre » par la bibliothécaire mais surtout l’excitation de découvrir des livres dont les titres étaient des invitations à grandir encore plus vite…
J’ai découvert Regain à cette époque, je l’ai lu avec plaisir. Son titre m’évoquait un paysage cuisant sous le soleil du midi.
Lorsque je l’ai relu, pour Clecture, j’ai fait un véritable voyage sensuel aux côtés de ces gens qui luttent, qui s’aiment au sein d’une nature sans concession.
J’ai savouré l’écriture concrète et poétique de Giono qui donne à voir les couleurs crues et suggère les émotions, les sentiments des personnages. J’ai éprouvé beaucoup de plaisir à faire partager cet ouvrage. Comme moi, beaucoup d’entre les membres de Clecture l’avaient lu, la plupart d’entre eux ont apprécié de le relire avec « quelques années et quelques expériences de plus ».
Arrivé en première position au palmarès 2014, il fait partie des livres qu’il faut lire et relire... »
Jérôme qui fait partie de ceux qui ont placé Regain en tête de cette sélection nous précise :
«Hors saison, la Provence à un charme que je goute de plus en plus. C’est une question d’équilibre entre ce que j’aimerais écrire et ce que je ressens en traversant, une ou deux fois l’an, les paysages chers à Giono, cachés derrière le Ventoux, du côté de Banon, de Forcalquier ou du pays de Sault…»
Voici maintenant quelques réactions des membres de Clecture sur ce palmarès. L’un dit :
«Que l’ouvrage de Giono soit en tête de ce classement est à considérer comme une sorte de négociation aboutie avec la littérature. Ce n’est certes pas l’ouvrage qui a demandé le plus d’efforts personnels à son auteur, le plus de travail sur soi, c’est un bon livre, une agréable narration ! Il en est ainsi des moyennes mathématiques, réjouissons-nous de cette " harmonie élective ". Regain, comparé à Ostinato, voire aux Chardons de Baragan, est très loin de la force d’écriture de ces deux ouvrages. La place, dans le fond du classement, d’Ostinato se comprend (malgré les regrets que l’on peut en avoir) : il est trop particulier pour faire l’unanimité. Plaignons ce pauvre Gide qui ne se remettrait pas de cette avant-dernière place ; preuve quand même d’un travail un peu bâclé ! Courteline quant à lui, ou plutôt à son ouvrage (paix à son âme), a vécu. Son roman n’a pas la force d’écriture qui lui permet de traverser l’histoire. Heureusement qu’il s’en tire mieux en théâtre !»
Tandis qu’une autre se réjouit :
«Finalement, je suis très contente du palmarès, même si Sue Hubbell a dû rétrograder. Cela prouve que Giono n’a pas pris une ride alors que Gide n’a pu tenir la longueur. Il ne suffit pas de bien écrire, il faut aussi avoir une histoire et des personnages crédibles. Les personnages de Giono sont pétris d’humanité et ils atteignent le rang de mythe au travers de Regain. On retrouve le même souffle dans Les chardons du Baragan de Panaït Istrati. Selon moi, Ostinato n’avait rien à voir dans notre sélection ; C’est un livre magnifique mais un livre de chevet, à déguster par petites bouchées. On ne peut le comparer à aucun autre. Il était important d’avoir un livre qui traite de la guerre de 14 et j’ai apprécié le ton de William Boyd et l’originalité de l’angle de vue. »
Une troisième de se sentir pousser des ailes :
«J'ai retrouvé, dans Regain, la belle langue poétique que j'avais aimée à la première découverte et je n'ai pas été déçue. J'ai été sensible au "chant du monde" qu'on trouve aussi dans Une année à la campagne et dans Les chardons du Baragan. C’est l'écriture poétique quej’apprécie dans ces œuvres.»
Et une lectrice, heureuse de ce voyage littéraire :
« Comme neige au soleil est le roman qui m’a franchement fait m’évader et que j’ai eu un franc plaisir à lire d’une quasi-traite. Il n’en reste pas moins vrai que j’ai été touchée par Mendiants et orgueilleux qui aurait aussi bien pu prendre la première place.»
Marie-Christine VacavantPour en savoir plus sur "CLECTURE", le groupe de lecture du CLEC